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Le
rôle de la bourgeoisie bretonne à la veille de la Révolution.
Dans les évènements qui ont précédé
la Révolution et qui l’ont provoquée, la
bourgeoisie a joué un rôle prépondérant.
En effet, si les classes populaires commencent à faire entendre leur voix,
c’est bien la bourgeoisie qui a déclenché le mouvement révolutionnaire.
Or, c’est en Bretagne que l’action de
la bourgeoisie a été peut-être la plus vigoureuse. Comment cela peut-il
s’expliquer ? Pour répondre à cette question, il faut rechercher tout
d’abord en quoi consistait cette bourgeoisie bretonne, de quels éléments
elle se composait.
La Bretagne n’avait qu’un faible développement
économique. L’industrie y était peu importante, et encore avait-elle presque
exclusivement le caractère d’une industrie rurale et domestique, appoint nécessaire
à l’existence des paysans qui s’y adonnaient, source de profits pour les
marchands qui trafiquaient de ses produits. Toutefois, on
constatait un commerce maritime assez considérable dans quelques ports :
à Saint-Malo, à Morlaix, à Lorient, à Nantes surtout.
Cependant la classe industrielle et commerçante
ne représente qu’une faible partie de la bourgeoisie. Dans les villes, il
existe bien un grand nombre d’artisans et de petits commerçants, mais qui se
distinguent très nettement de la haute bourgeoisie commerciale : ils
forment la masse de ce qu’on appelle la commune.
De toute les fractions de la
bourgeoisie, la plus vivante, c’est celle qui est constituée par les médecins
et chirurgiens, et surtout par les hommes de lois, avocats, notaires,
procureurs, juges seigneuriaux, car le nombre des justices est très considérable
en Bretagne, et quelques sièges de justices seigneuriales comptent parmi les
tribunaux les plus importants de la province. On peut considérer tous ces
hommes de loi comme appartenant à la même classe sociale. De cette classe
bourgeoise se détache, dans toutes les villes, une sorte de patriarcat urbain,
qui détient les charges municipales, pour ainsi dire à titre héréditaire, et
qui, aux États de Bretagne, représente l’ordre du Tiers. Beaucoup de ces
hommes, d’ailleurs, confinent à la noblesse, sont des anoblis. Et l’on
comprend alors l’opposition violente qui éclatera entre cette aristocratie
bourgeoise et la masse de la population urbaine.
Notons encore que la bourgeoisie doit
exercer une grande influence dans les campagnes, où elle possède souvent
d’assez importantes propriétés foncières. C’est
cette prépondérance des hommes de loi qui explique qu’à la suite des
édits de mai 1788, qui étaient un coup d’état contre les Parlements, la
bourgeoisie ait suivi docilement le mouvement d’opposition et de révolte des
Parlementaires et des nobles, dont la cause se trouvait confondue. Mais l’adhésion
à l’opposition parlementaire ne fut pas unanime et à Quimper on
n’avait pas suivi le mouvement.
Mais cette union de la noblesse et de la
bourgeoisie ne devait n’être qu’éphémère, de profonds dissentiments séparaient
le Tiers État et les ordres privilégiés au sujet
des privilèges fiscaux et en particulier à propos des fouages
extraordinaires.
Voilà donc les causes profondes du
conflit, et ce conflit doit être d’autant plus fort que la noblesse bretonne
est nombreuse et remuante, férue de ses droits et de ses privilèges et
qu’elle a une situation prépondérante aux États.
L’agitation parlementaire
aura eu pour résultat essentiel de donner l’impulsion à l’organisation du
Tiers État, d’avoir même tracé les cadres de l’organisation, d’avoir
employé les procédés d’agitation dont le Tiers État tirera un si
beau parti.
Sources.
SEE,
Henri « Le rôle de la bourgeoisie bretonne » -
J.Lohou(déc.2004)