Page Fabrique

Une chicane familiale à Plusquellec.


  En 1715, Jacques Le Foll et Marie Quénec'hdu décide de ne pas renouveler le bail de leur fermier et cousins germains Pierre Guézennec, au motif qu'il laisse les immeubles affermés se dégrader. Marie et Marguerite  sont filles des deux frères Jean et François Quénechdu, eux-même fils de Yves et Marguerite Guézennec comme indiqué dans le tableau de cousinage joint en annexe ;  deux familles fort connues et alliées de Plusquellec.

Le 20 avril 1716, lundi de Quasimodo, Louis Bercot, 63 ans du village du Corvé en Duault et René Tanguy, 50 ans du village de Hirbridou en Carnoët, viennent sur les lieux estimer le préjudice et fixer le dédommagement. Après cet arrangement amiable, tous quatre vont jusqu'au bourg boire une chopine chez Marie Ropers, en compagnie de François Guénégou et Yves Le Foll. Ceux-ci ne se font pas faute de morigéner les deux cousins : "Ils devraient avoir honte comme proches parents d'une telle chicane." Jacques  Foll se laisse convaincre, Pierre Guézennec accepte les conditions ; il paiera une ferme annuelle de 45 livres jusqu'en 1721. L'accord verbal en présence de témoins suffit, il n'est pas nécessaire de passer devant un notaire, la somme n'excédant pas les 100 livres.

Au cours de la discussion, une objection a été soulevée. Marie Quénec'hdu, à qui appartiennent les biens, ne risque-t-elle pas de dénoncer l'accord? Il revient au mari, rétorque Jacques Foll, de gérer les héritages de sa femme.

Marie Quénec'hdu n'est pas de cet avis. "On a surpris, dira-t-elle, son mari dans le vin." Le 27 avril, le couple arrive de Guernanfouler en Carnoët où il habite, avec une charrette de meubles et chasse les bestiaux de leur cousin hors des terres du village de Rumoyec. Mais impossible d'ouvrir la porte de la maison avec leur clé : un morceau de bois obstrue le trou de la serrure. Ils entrent de force.

Pierre Guézennec les assigne dans un exploit en la Juridiction de Coatleau puisque Jacques Foll ne s"est pas dédit dans les 24 heures; il justifie son revirement par l'opposition de sa femme, " une pauvre raison à déduire puisque suivant les articles 424, 428 et 429 de la Coutume et les arrêts de règlements, le mari est administrateur du bien de sa femme et le maître du revenu de ses droits et immeubles à raison de leur communauté, à joindre que les prétextes dudit Foll ne sont fondés que sur légèreté et inconstance mêlée de beaucoup de dol personnel, puisque si son trouble avait eu lieu, il aurait causé audit Guézennec une dépense de 4 livres et 6 sols qu'il fit de la convention de la ferme."

Maître Jean Fercoq[1], notaire de Botmel, ajoute que toutes les métairies ont été affermées entre temps. Pour toute ces raisons, Pierre Guézennec espère être bien fondé à obtenir que Jacques Foll et Marie Quénec'hdu soient " condamnés de lui faire jouir de l'effet de sa dite ferme verbale, ce faisant de vider la dite maison et crèche et même de les réparer au dire des conventions d'entre eux avec défense de ne plus troubler, ni lui méfaire en sa personne, ni en ses biens et en outre de lui payer ses dommages et intérêts à dire d'experts pour tout le temps de la jouissance et autres pertes qui en peuvent provenir, joint son offre d'effectuer de sa part toutes les conditions." Maître Jean Fercoq conclut en s'en remettant à l'équité ordinaire du Sénéchal.

 

            Condamné, Jacques Foll fait appel devant la cour de Callac : il a besoin de la maison pour se loger. Argument rejeté. En juillet 1717, Guillaume Floyd, sieur de Rosneven et seul juge de la Juridiction et châtellenie de Callac confirme la sentence de la Juridiction de Coatleau. Le 21 octobre suivant une nouvelle et définitive condamnation est prononcée par la Cour Royale de Carhaix.

 

            Ses deux frères, Henry Guézennec du village de Coatleau Huellan et Guillaume Guézennec du village de Kermorgant, les deux, ménagers de Plusquellec, apportent leur caution à Pierre Guézennec.


 

Sources.

GUÉZENNEC, Marie- La Seigneurie de Coatlëau en Plusquellec – 1482-1733-Extraits-septembre 1999.

 



[1] Jan Fercoq, grand-père de Pierre Joseph Fercoq-( LOHOU, Joseph- "Pierre Joseph Fercoq, un républicain sincère"-Cahier du Poher n°6- juin 2001-p43-46.)

{2] Jacques Foll, (°1684 Plusquellec- +1741 Carnoët), fils de Guillaume et Jeanne Guénégou, se remarie en 1726 avec Anne Le Maistre, veuve de M° Jan de la Rochehuon, au décès de son épouse Marie Quénechdu en 1724. Il décède à Carnoët en 1741 à l'âge de 57 ans.